Compte rendu de lecture: La guerre de l'information de David Colon

 Né le 07 avril 1993 à Grenoble, David Colon est un écrivain, professeur agrégé et historien de nationalité française. Il est l’auteur de nombreux ouvrages parmi lesquels on peut citer : La guerre de l’information, publié en 2023 aux éditions Tallandier. Un livre qui d’ailleurs fait l’objet de ce compte rendu précisément le chapitre 4 intitulé : Les médias, champ de bataille de la guerre secrète de l’information. C’est un extrait de nature doctrinale car l’auteur relate au fil des pages sa pensée appuyée par des exemples précis sur la guerre de certains Etats par le biais de l’information.

Chapitre 4 : Les médias, champ de bataille de la guerre secrète de l’information

L’auteur relate la frappe d’Al-Qaida sur le sol américain le 11 septembre 2001. Certaines images destructives ont été diffusés en direct. Al Qaida remporte ainsi une bataille décisive dans la guerre de l’information mondiale. Deux mois plus tard une structure a été mise en place par les américains afin de coordonner la guerre de l’information contre le terrorisme. Les Etats Unis cherchent à contrôler les médias ou d’influencer leur contenu.

 - La manipulation des médias par le renseignement américain

En 2002 l’administration américaine met en place une nouvelle méthode de propagande appelé « communication stratégique ».  Cette dernière repose sur la diplomatie publique, les opérations d’informations et l’action psychologique. La CIA est le plus dynamique des agences en termes manipulation clandestine de l’information.

- L’art de manipuler en secret les journalistes

L’auteur explique à travers des exemples précis comment la presse occidentale est facile à manipuler. Les journalistes ne s’intéressent qu’à des scoops dont la source n’est pas très claire ou alors à rédiger des piges pour le compte d’agences de relations publiques afin de gagner des revenus qui peuvent augmenter leur salaire. Le journaliste Richard Norton –Taylor témoigne que les agences de renseignement britannique n’ont aucun mal à implanter de fausses histoires dans les médias en manipulant les journalistes (…)

- Les armes américaines de désinformation massive

Après l’attaque d’Al-Qaida sur le sol américain, la CIA a eu carte blanche pour recourir à la propagande contre Al-Qaida et les talibans. Ainsi, Paul Wolfowitz a fait partie dans les années 1970 de « l’équipe B », un groupe d’analyse parallèle chargée par la CIA de répandre des informations montrant la prétendue supériorité de l’URSS sur les Etats Unis en vue de convaincre le Congrès de reprendre la course aux armements. Cette manipulation des médias est plus massive au Royaume Uni, où il n’est pas interdit aux journalistes aux agences de renseignement de fournir des informations aux journalistes.

- L’« invention » d’Abou Moussab al Zarqaoui

Le cas le plus emblématique de la communication stratégique manipulatoire américaine est celui d’Abou Moussab al-Zarqaoui. Une brève publiée par Associated Press en 2001, souligne que ce dernier préparait des attentats aux Etats Unis et en Israël, le jour de l’An précisément. Or, rien ne s’est produit. En septembre 2002, l’administration Bush lance une campagne de communication stratégique visant à établir un lien entre Al-Qaïda et l’Irak de Saddam Hussein. Abou Moussab al-Zarqaoui en devient alors le personnage central.

- L’offensive américaine de désinformation en Irak

Le déclenchement de l’offensive en Irak, le 20 mars 2003, voit l’armée américaine s’employer à détruire les systèmes de communication irakiens, à déstabiliser son espace informationnel, et à chercher à intoxiquer l’armée adverse. L’armée américaine fait également publier le 6 mai 2003 dans le Washington Times une fausse information selon laquelle la France aurait accordé des passeports à des membres du gouvernement de Saddam Hussein par l’intermédiaire de son ambassade en Syrie. Avant, pendant et après la campagne militaire de la guerre d’Irak, le flux de désinformation stratégique ne tarit jamais. La désinformation sur les armes de destruction massive prétendument détenues par l’Irak n’est qu’un élément d’une bien plus vaste offensive informationnelle.

- Comment les États instrumentalisent la chaîne de production de l’information ?

L’Etat exerce une certaine influence sur la production de l’information. Les sociétés de relations publiques fournissent la matière première de 60 % des articles, tandis que 12 % à peine des articles proviennent du seul travail des reporters. Les journalistes se laissent influencer par des communiqués du gouvernement ou des décisions venant du corps gouvernemental.

- Les « nouvelles de la Terre plate »

Les « nouvelles de la Terre plate », telles que définit par NICK DAVIES, sont des histoires qui semblent vraies et qui sont largement acceptées comme telles, quand bien même elles ont pour origine une opération de relations publiques. Rien n’est plus simple, en définitive, que d’injecter dans la fabrique de l’information des données attrayantes mais peu fiables, pour servir des intérêts particuliers, sans que personne ne les vérifie jamais.

- Le « journalisme de barattage »

Ce fait est plus visible avec l’apparition des sites d’informations en ligne et les médias sociaux. Dans la guerre de l’information, les journalistes pressés et stressés, à la recherche d’histoires faciles, rapides et sûres, sont des proies faciles pour les propagandistes. Les médias sont ainsi aisément manipulés par des acteurs étatiques et non étatiques qui recourent à l’industrie des relations publiques pour influencer à travers eux les opinions publiques.

- L’industrialisation de l’infox

L’industrie de la désinformation a rendu les médias très vulnérables. Les médias sociaux sont, quant à eux, devenus un théâtre de la guerre. L’auteur s’appuie sur l’expérience de certains journalistes comme Julien Fomenta Rosat qui en mai 2022, raconte dans Fakir comment, pour le compte d’une mystérieuse agence de relations publiques, il a rédigé pendant six ans des « articles bidons » sur commande pour « gagner [sa] croûte ». En janvier, 2017, par exemple, on lui demande de rédiger un article pour critiquer l’adhésion du Monténégro à l’OTAN : « Il faut, lui écrit la commanditaire, que l’article soit neutre et journalistique tout en développant que le Monténégro est trop corrompu et victime de trop de crime [sic] pour adhérer à l’OTAN. Ne pas parler de la Russie. » En six ans, il a publié sous de multiples pseudonymes 595 articles, sur à peu près tous les sujets, qu’il s’agisse de défendre le glyphosate ou de critiquer le laxisme de la France vis-à-vis d’un opposant au président kazakh.

Conclusion

Au fil des pages l’auteur développe l’idée selon laquelle les médias seraient dépendants d’une force extérieure et que l’information n’est pas un brut. La fabrique de l’information dépend de plusieurs considérations politiques et sociaux. En temps de guerre, les médias sont utilisés comme appât par les certains pays pour atteindre leurs cibles à travers de la propagande orchestrée de toute pièce.

Il faudrait d’un autre coté se demander si les médias ne peuvent pas assurer un rôle médiateur en temps de guerre et ne pas se contenter d’être manipulés tels une machine. Les médias, en principe, doit rendre les faits, aussi exactement que possible et s’en limiter.


                                                                                            Fatou Ndiaye  

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